Les oubliés – 7 septembre 1914

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7 septembre 1914, banlieue de Montréal

Voilà une heure que nous faisions marche forcée, c’était la seule chose possible à faire à la base. Dormir, boire et marcher. Voilà mon horaire aussi lassant soit-il.

 

À 3 mètres de moi, le colonel de brigade, Joseph Dorlant, nous cria à-tue-tête : « Plus vite ! Je n’ai pas que ça à faire nom de Dieu ! »

 

Comme je vous l’ai dit plus tôt, je ne vois pas ce qu’il aurait à faire de plus important que de nous dire de se dépêcher et de marcher la tête haute. Parfois, je me demande comment un trou à rat comme ça peut exister…

 

Dorlant nous cria quelque chose, mais les pas et le tintamarre de l’équipement me rendait sourd.

 

La colonne devant moi stoppa sa marche. Je m’arrêtai donc un peu décontenancé, en espérant que l’on n’ait pas remarqué mon incompréhension.

 

Devant nous, il y avait une vingtaine de cibles, avec des marques de tirs. Déjà, la plupart chargeait leur Mark Ross et je devinai ce que l’on aurait à faire.

 

« Chargez armes ! »

Le cliquetis aigu des balles du Mark Ross me faisait l’impression d’une horde de criquets en chamade. Comme c’était déplaisant !

 

« Visez cibles ! »

Nous levâmes nos fusils dans une coordination quasi parfaite.

 

 

 

« Feu ! »

Nous tirons et la seule chose audible fut le coup de feu de quatre soldats chanceux d’avoir un Mark Ross en bon état, même à cela seul un d’entre eux toucha la cible à la tête.

 

À côté de moi, Charles Voireux fulmina et jeta son fusil par terre en jurant toutes les insultes qu’il pouvait connaître.

 

Je me retournai en maugréant tout bas : « Saleté de fusil britannique, on ne peut quand même pas aller à la guerre avec ça ! »

 

Clément Jannard

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