En souvenir de Revan…

Dans la lumière du soleil déclinant, Revan regardait les Profanés quitter le repaire en ruine de Zaeed. Silencieux, les yeux humides, le souffle court, le chef de la Main Rouge n’en avait plus pour longtemps et il le savait. Le trou béant dans sa cage thoracique saignait encore abondamment. Tout autour, sur sa peau et dans ses chairs, une tache noirâtre et surnaturelle grandissait presque à vue d’oeil.

 

« Ces enfants t’auraient suivi jusqu’en enfer, Revan. Tu le sais, non? » C’était la voix calme et neutre de Corvo, son plus vieil ami. Accroupi tout près de lui, l’androïde le fixait toujours de ses yeux trop sages, ses yeux qui avaient vu tant de choses dans le Neuvième Monde.

 

« Ce ne sont plus des enfants, Corvo. Plus maintenant. Plus après aujourd’hui. » Revan détourna enfin les yeux de l’arche par où les jeunes étaient partis et fixa son vieux frère d’arme. « Sans la peau, comme ça, t’as vraiment… une sale gueule. Tu le sais, non? »

 

Corvo sourit tristement. « La peau repoussera. Elle repousse toujours. »

 

« Possible. Le plus tôt… sera le mieux, si tu veux mon avis. Parce qu’avec une tronche comme ça… même Éris pourrait bien arrêter… de te tourner autour! » Fier de sa propre blague, Revan eut un petit rire douloureux. Chose très rare, Corvo rit lui aussi.

 

Le rire de Revan s’étrangla dans une quinte de toux sanglante. Corvo lui mit la main sur l’épaule pour le calmer, mais la tache noire qui se répandait sur la plaie du jack continuait de s’étendre, menaçante… La douleur fut longue à se calmer.

 

« Cor…vo… Pr… Prends soin d’eux. Pour moi. Promets-moi… Promets que tu vas t’occuper d’eux. » Les yeux du vieux vagabond ruisselaient de larmes qui n’étaient pas toutes le fruit de la douleur. « S’il-te-plait, Corvo. »

 

L’androïde regarda son vieil ami droit dans les yeux. Puis, son visage devint solennel. « Je te le promets, Revan, fils de Dregan. Je veillerai sur chacun d’entre eux. Je les protègerai du danger. Et d’eux-mêmes, si je le peux. J’en fais le serment. »

 

Revan eut un sourire où se mélangeaient le soulagement, la reconnaissance et la souffrance. Des larmes coulaient encore sur la peau bronzée de ses joues mal rasées. « Bien… C’est bien. Maintenant… donne-moi Cracheur… et laisse-moi. »

 

D’un mouvement lent et gracieux, le bras mécanique de Corvo ramassa le pistolet à fusion et le remit à son ami. Puis, il hésita. « Ça n’est pas obligé de se passer ainsi, Revan. Personne ne devrait mourir comme ça, seul. »

 

De sa main tremblante, Revan saisit l’arme qui lui avait sauvé la vie un nombre incalculable de fois. Puis, il leva les yeux vers ceux de son ami, le plus vieux d’entre tous, le seul véritable frère qu’il ait jamais eut en ce monde. « À la fin… tout le monde… meurt seul. »

 

Corvo hocha la tête, puis se leva. Il sourit une dernière fois à cet humain qu’il avait appris à connaitre, à respecter et à aimer comme un frère. Puis, il se retourna et partit à son tour.

 

Longtemps après, l’écho d’une unique détonation retentit dans les décombres des rues dévastées de Manaan.

 

 

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