Une illusion de béton et de briques

 

Cet article s’adresse à tous ceux qui trouvent que le système d’éducation québécois actuel est, disons… défraîchi, mais il s’adresse également au gouvernement, qui, je pense, ne perdrait rien à prendre en compte l’opinion d’une élève qui en est à sa 11e année à fréquenter son système et qui trouve qu’il commence à être sérieusement temps que les choses évoluent.

En tant qu’élèves (et je suis convaincue que c’est aussi le cas de certains enseignants), on en vient à se questionner sur le but fondamental de ce que nous faisons. Personnellement, je me pose la question : tous ces examens, à quoi servent-ils vraiment ? Parce que faire apprendre des pages et des pages de matière à des élèves pour qu’ils recrachent le tout en 75 minutes sur d’autres feuilles n’est pas très logique pour moi. Je suis une personne qui adore apprendre, mais franchement, le système actuel d’évaluation n’est pas une forme valable d’apprentissage pour moi, puisque le « par cœur », bien qu’impressionnant, ne peut démontrer la compréhension des gens. Il me semble qu’il serait intéressant de trouver d’autres façons d’apporter des connaissances aux étudiants sans que ceux-ci en soient complètement indifférents, voire répugnés.

La préparation jusqu’à ces fameux examens n’est pas moins toxique. Des heures de devoirs et de leçons qui grugent tout notre temps libre. Toutes ces heures pourraient franchement servir à autre chose, comme permettre aux élèves de se reposer ou de se divertir après toute une journée consacrée à apprendre. D’ailleurs, j’aimerais soulever un autre point : en secondaire 5, nous devons choisir ce que nous désirons faire après l’obtention de notre diplôme. Mais comment sommes-nous censés choisir sans l’ombre d’un doute le programme qui nous mènera à l’emploi de notre vie ? Un choix de carrière devrait se baser sur nos intérêts, mais difficile de les découvrir et de les explorer si on n’en n’a pas le temps. À quoi bon réussir le secondaire si, au bout du compte, on n’a qu’une vague idée de ce qu’on a envie de faire après ? Peut-être le gouvernement aurait-il envie de me répondre que les conseillers d’orientation viennent dans les classes et prennent le temps de nous montrer toute l’étendue de nos choix. Le problème, c’est que ces visites se comptent sur les doigts de la main et sont plus que générales.

Et ce n’est pas tout. Parlons des cours en tant que tels. Actuellement, ce qu’on demande à des milliers d’élèves, c’est de se lever le matin pour aller s’asseoir sur une chaise inconfortable pendant 5 heures, et ce pour mettre toute leur énergie et leur concentration à écouter et prendre des notes sur un sujet qui, dans la majorité des cas, ne les intéresse pas. Attention, ceci n’est pas une attaque envers les enseignants, qui font avec ce qu’ils ont, c’est-à-dire un programme imposé par le Ministère de l’éducation et des locaux en décrépitude. De plus, tous les élèves ont des façons d’apprendre différentes et tous les mettre dans le même panier sans distinction en se disant “qu’ils vont s’adapter” c’est tout sauf pédagogique. Le système du “restez assis et taisez-vous » est dépassé et il serait temps pour le gouvernement de faire ses devoirs en regardant ce qui se fait ailleurs et en prenant des notes à ce sujet. Ce n’est pas normal que presque tous les élèves arrivent le matin à l’école avec la tête baissée et les mains dans les poches.

Un autre problème est que nous avons perdu l’essence même de l’éducation. L’émerveillement face à de nouvelles connaissances se perd entre le stress de la perspective des examens et

l’environnement d’apprentissage tout sauf stimulant. Les nouvelles écoles, comme l’école secondaire du Havre, à Terrebonne, sont un pas en avant pour offrir un meilleur lieu d’apprentissage aux élèves et un milieu de travail agréable pour les enseignants. Reste à apporter des changements aussi importants et positifs à la pédagogie elle-même.

Le gouvernement n’innove pas. Il ramène constamment sur la table de vieilles options, de vieux concepts. Ce dont on a besoin, c’est d’une réforme, et d’une vraie. Je pense à un système qui n’existe nulle part encore dans le réseau public. Un système avec des choix de cours variés, intéressants. Un système qui prend en compte tous les élèves et met en valeur leurs capacités, leurs forces respectives. Un système dont l’objectif n’est pas de classer les élèves par catégories, de les voir soit réussir soit échouer, mais de les voir grandir et s’enrichir, et ce, à tous les niveaux. Un système qui apprend à ses élèves les rudiments de la vie elle-même. L’approche traditionnelle, aussi répandue soit elle, n’est pas une approche saine. Loin de moi l’idée de vouloir embarquer dans le bon vieux débat privé contre public, mais, pour moi, le collège Sainte-Anne, un établissement privé de Montréal, a tout compris. Le documentaire L’école autrement en parle plus en détails.

J’ai lu bon nombre d’articles dont les auteurs partagent mon opinion, et certaines de leurs lignes valent la peine d’être reprises. Valérie Jodoin, par exemple, a écrit dans Le Devoir que “Ce n’est pas normal que des jeunes qui réussissent bien perdent leur motivation parce que le système scolaire devient désabusé.” Dans son article de La Presse, Alexandre Vigneault cite Érik Cimon, réalisateur du documentaire L’école autrement : “Ça brise les élèves. L’évaluation devrait servir à s’améliorer, à faire des erreurs et à en tirer des apprentissages, pas à donner des notes qu’un enfant traînera comme des boulets.”

Ce ne pourrait être plus vrai.

Si vous voulez des pistes de solutions, je pense que le système d’éducation québécois devrait :

· Se soucier davantage du bien-être de ses élèves ;

· Remplacer le système de notes actuel par quelque chose de beaucoup moins dégradant, en vérifiant la compréhension des élèves en leur parlant et en regardant leurs exercices, par exemple ;

· Offrir un environnement plus stimulant aux élèves ;

· Rendre les cours existants plus stimulants et offrir une plus grande variété de cours ;

· Laisser leur temps libre aux élèves après leur journée de cours et pendant la fin de semaine ;

· Transformer les semaines de 5 jours en semaines de 4 jours.

M. le ministre de l’Éducation, en mon nom et en celui de tous les étudiants qui fréquentaient, fréquentent et fréquenteront le système d’éducation du Québec, soyez digne de votre titre et transformez notre province en un modèle d’éducation, bien au-delà des résultats que ses étudiants sont capables d’obtenir.

Documentaire L’école autrement : https://video.telequebec.tv/details/43521?playlist_id=294

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